Dans son article 4.2.8 et son annexe A, l’ISO 12647-2:2013 édicte des recommandations en matière de définition du gris neutre et de balance de gris. Il s’agit bien de recommandations et non pas d’exigences normatives. L’objectif est de lever l’ambiguité sur ce que l’on appelle communément “gris neutre” et de situer la recherche de la balance de gris en regard des exigences colorimétriques de la norme et des procédures de calibrage des systèmes d’impression qui en découlent.
Plus précise en la matière (grise) que dans sa version 2004, l’ISO 12647-2:2013 tente ici d’harmoniser la prise en compte de la notion de gris neutre dans les procédure de standardisaiton mises en oeuvre de part et d’autres de l’océan Atlantique.
L’article de l’ISO 12647-2 version 2013 consacré à la reproduction du gris et à la balance de gris commence par les termes “il convient que” marquant ainsi que son contenu doit être compris en tant que préconisation non contraignante. Reconnaissant que la balance de gris d’un procédé d’impression peut servir à son calibrage et au contrôle en production, l’ISO 12647 précise que cette balance doit être déterminée “séparément pour chaque condition d’impression standard sur la base d’une reproduction du gris bien définie“.
Concernant cette définition de la reproduction du gris, les membres du comité technique 130 de l’ISO (en charge des questions graphiques) sont tombés d’accord sur une formule mathématique, qui pour chaque valeur de CIELAB L* (luminance), entre le CIELAB L* du support papier et le CIELAB L* le plus sombre atteignable par la supperposition des encres cyan, magenta et jaune, permet le calcul des valeurs CIELAB a* et b* procurant une sensation visuelle neutre.
Cette formule définit donc le gris neutre pour chaque valeur de luminance (CIELAB L*) selon d’une part la valeur CIELAB du support d’impression et la valeur CIELAB de la surimpression C100, M100, J100.
Dans sa version précédente, l’ISO 12647-2:2004 se contentait de définir trois patchs gris CMJ, pour les hautes lumière (C20, M19, J19), les demi-tons (C50, M40, J40) et les ombres (C75, M64,J64) censés être utiles car produisant “souvent” une couleurs “proche” du neutre (on eu fait plus précis…). Elle donnait également deux “définitions du gris neutre qui entrent parfois en conflit” (SIC, traduit librement de l’anglais) :
- une couleur qui à les mêmes valeurs CIELAB a* et b* que le support d’impression ;
- une couleur qui a les mêmes valeurs CIELAB a* et b* qu’une teinte de même valeur CIELAB L* imprimée avec la seule encre noire.
Historiquement, en revanche, le G7 (qui édite notamment les données de caractérisation standard GRACoL et SWOP en vigueur outre-atlantique) mettait l’accent sur le respect d’une balance de gris neutre.
Pour cela il avait lui même adopté une formule mathématique définissant sans ambiguité ce qu’est un gris neutre :
- a* de la plage de gris = a* du papier x (100 – C%) / 100 ;
- b* de la plage de gris = b* du papier x (100 – C%) / 100.
On le voit, la formule historique du G7 et celle de ISO 12647-2:2013 divergent quelque peu. Le G7 part de la couleur du support d’impression, utilise la valeur de pourcentage du cyan de la plage comme gradation, et cible un gris CMJ 100% neutre (a* = b* = 0). L’ISO 12647-2:2013 part elle aussi de la couleur du support, utilise la valeur L* comme gradation et cible la couleur réelle du gris CMN 100 %.
Pour autant, sans entrer, dans le détail mathématique, le résultat obtenu en pratique par l’une ou l’autre formule est suffisamment proche pour entrer dans les tolérance normative de stabilité d’une presse offset.
Question méthodologie, le G7 s’inscrit on le sait (au moins depuis 2004), dans la démarche de normalisation de l’ISO 12647. Il cible les mêmes tolérances en termes de chromaticité des aplats cyan, magenta, jaune et noir, comme en termes de déformation du point de trame. Mais il insiste en plus, pour calibrer les presses, sur le respect de courbes dite NPDC, à même de garantir l’obtention d’un gris neutre tout au long de la gradation. Dans les faits, pour une même condition d’impression standard, les données de caractérisation et profil ICC GRACoL édité par le G7 offre un rendu légèrement différent de celui obtenu par les standard de la Fogra, visible notamment si l’on compare une épreuve ISO 12647-7 réalisée selon un profil GRACoL 2006 ou un profil Fogra 39.
Cela étant dit, que l’on souhaite respecter un standard ou un autre, la procédure de calibrage d’une presse par le calcul de courbes de gradation, est assez semblable : on cible soit directement les courbes de la norme, avec ou sans l’option balance de gris des NPDC, soit les courbes extraites d’un profil ICC standard (réalisé selon des données de caractérisation standard) Fogra 39 ou GRACoL. La seconde méthode présente l’avantage que la presse offset, comme le système d’épreuvage, ciblent très précisément les mêmes valeurs (celle du profil ICC). Mais, pour peu que le calibrage soit réussit, chacune des méthodes permet d’obtenir une impression dans les tolérances de la norme et des gris neutres.
Partant de là, la procédure concernant l’utilisation de la définition du gris et le contrôle de la balance de gris inscrite en annexe A de l’ISO 12647-2:2013 peut-être partagée, cela que l’on se réfert aux données de caractérisation de la Fogra ou à celle du G7 :
- pour chaque condition d’impression standard, on établit les données de caractérisation standard (selon l’ISO 12642) ;
- on obtient ainsi une table de correspondance CMJN – LAB, dont on peut extraire les valeurs CMJ correspondantes aux valeurs LAB de l’échelle de gris neutre (obtenue grâce à la formule de l’ISO 12647-2:2013) ;
- de la gradation de ces valeurs, on déduit la balance de gris (c’est-à-dire les trois courbe cyan, magenta et jaune, produisant le gris neutre) ;
- enfin, l’ISO 12647-2:2013 propose une autre formule pour le calcul des tolérances de cette balance des gris, tolérance exprimée en ∆Ch :
Et le tour est joué !
L’ISO 12647-2 est une norme métier. En ce sens elle édicte des cibles normatives à atteindre mais en aucun cas n’exige de respect de procédures particulière pour les atteindre. La méthodologie et le choix des outils est libre, seul le résultat compte. C’est pourquoi, ce chapitre concernant la définition du gris et l’obtention de la balance, n’est présent dans la norme qu’au titre de recommandation, précisant simplement comment l’outil “balance des gris” doit être compris en environnement normatif.
Reste à savoir si ce pas en avant vers une définition universelle du gris neutre aboutira un jour (à moyen ou long terme) à une convergence des standards entre la Fogra et le G7. Selon la formule consacrée, c’est l’histoire qui nous le dira.